Chapitre 53 : Fouille

 

 

 

La cour impériale était si silencieuse qu’on pouvait entendre une mouche voler. Les yeux de Xiao Chiye s’assombrirent tandis qu’il retirait son insigne. Sa poitrine se soulevant, Li Jianheng annonça :

- Le commandant suprême de l’Armée Impériale, Xiao Chiye, est dorénavant suspendu de ses fonctions et assigné à résidence le temps de l’enquête ! Les patrouilles internes et externes de Qudu seront reprises par la Police Militaire et les Huit Grands Bataillons.

Debout parmi la foule de fonctionnaires, Xi Hongxuan regarda Xiao Jiming, qui n’avait pas encore pris la parole, par-dessus la mer de chapeaux en gaze noire. Il demeurait parfaitement immobile, imperturbable face à la scène qui se jouait devant lui. Il a bien trop d’assurance, jura intérieurement Xi Hongxuan.

Sans surprise, Xiao Jiming était un dur à cuire. Bien que Xiao Chiye soit dans une situation aussi délicate, il ne montrait pas le moindre signe d’agitation. Il observait sans prononcer le moindre mot.

 

***

 

Une fois l’audience matinale terminée, deux hommes se retrouvèrent dans le Pavillon Ouhua de la Rue Donglong. Ayant ôté son insigne doré et enfilé une élégante tunique blanche brodée à larges manches, Shen Zechuan laissa une courtisane le conduire à l’étage. Xi Hongxuan était allongé sur une banquette, observant le thé qui infusait. Lorsqu’il le vit, il éclata de rire.

- Lanzhou, n’était-ce pas satisfaisant ? Depuis le terrain de chasse, Xiao Er a eu coup d’avance sur coup d’avance. Lui rendre la monnaie de sa pièce est tellement agréable !

Shen Zechuan s’assit.

- Se servir de Fu Linye était malin. Je ne pensais pas que vous le feriez passer dans votre camp, lui aussi.

- Connaissez-vous l’histoire des Fu ? Autrefois, ils ramassaient la bouse de vache aux portes de Chuncheng. Si notre Vieux Maître Xi n’avait pas su reconnaître leur talent et ne les avait pas libérés de leur condition inférieure, leur petit Clan Fu serait encore en train de faire paître le bétail.

Xi Hongxuan accepta le thé tendu par une servante et en goûta quelques gorgées avant de poursuivre :

- Quand au piège tendu par l’Aîné Wei – quel dommage, Xiao Jiming n’a pas mordu à l’hameçon.

- Faire tomber Xiao Er n’a pas été un mince exploit, dit Shen Zechuan en sirotant également son thé. Si vous provoquez Xiao Jiming maintenant, je crains que les pertes ne surpassent largement les gains.

- La meilleure stratégie est de battre le fer tant qu’il est chaud. Si nous ne le faisons pas maintenant, alors quand ?

Xi Hongxuan congédia la servante d’un geste de la main et se redressa sur son siège.

- Même si Xiao Jiming ne subit qu’une petite défaite, cela restera malgré tout une faille dans leur armure.

- Je croyais que votre objectif était Qudu. Comment pouvez-vous chercher la bagarre avec la frontière avant d’avoir stabilisé vos fondations ? demanda Shen Zechuan. Vous n’avez pas encore sécurisé votre mainmise sur les Huit Grands Bataillons. Si vous repoussez Xiao Er aujourd’hui, vous trébucherez sur lui à l’avenir.

Xi Hongxuan reposa son thé.

- Dans ce cas, d’après vous, que devrions-nous faire ?

- Vous l’avez déjà dit, sourit Shen Zechuan. Battre le faire tant qu’il est chaud.

Xi Hongxuan réfléchit.

- Notre attaque d’aujourd’hui lui a fait perdre la confiance de l’empereur ; il n’a plus d’insigne et sera au moins enfermé jusqu’au printemps. Mais il a été ami avec l’empereur pendant des années. Un simple revers ne le retirera pas de l’échiquier.

- Tant que Xiao Er restera commandant suprême de l’Armée Impériale, la défense de Qudu finira toujours par retomber entre ses mains. Nous sommes-nous donné tout ce mal dans le simple but de faire mumuse avec les Huit Grands Bataillons pendant un mois ou deux avant de les lui rendre encore intacts ? demanda Shen Zechuan. Vous avez porté un coup à Xiao Er, cette fois. Mais, au printemps, lorsqu’il se sera remis et reposé, serez-vous prêts pour sa contre-attaque ?

Xi Hongxuan ouvrit son éventail et s’en servit pour se rafraichir.

- Que pouvons-nous faire d’autre ? Il est impossible de se débarrasser définitivement de lui.

- Vous ne pouvez pas vous débarrasser de lui, mais vous pouvez l’avoir à l’usure.

Shen Zechuan n’appréciait pas le thé fort ; après sa première gorgée, il ne toucha plus à sa tasse.

- Sa Majesté le soupçonne déjà et, dans les jours qui viennent, ses doutes ne feront que croître. C’est le moment idéal pour passer à l’action.

- Je n’ai ni talents militaires prodigieux, ni services méritoires passés, s’esclaffa Xi Hongxuan. Comment puis-je me comparer à lui ?

- Inutile d’être modeste, dit Shen Zechuan en tapotant la table avec son doigt. Dans le Pavillon Ouhua, les mélodies sont enjouées et originales. Même Sa Majesté, autrefois un visiteur fréquent des maisons de plaisir, les trouverait aussi légères qu’une brise d’air frais. Xi Er-gongzi, avez-vous vraiment l’impression de ne pas pouvoir vous comparer à lui, lorsqu’il s’agit de s’amuser ?

- Sans parler de la désapprobation du Secrétaire Aîné Hai pour ce genre de choses – même en tant que compagnon de beuverie, je ne peux absolument pas rivaliser avec Xiao Er, dit Xi Hongxuan. Vous devez avoir un autre tour dans votre sac.

- Depuis que Xue Xiuzhuo est entré à la Cour de Contrôle Judiciaire, il s’est occupé de plusieurs affaires majeures. Mais il n’est, après tout, qu’un homme. Et, s’agissant de talent et de gloire érudite, il est également surpassé par Yao Wenyu, qui arpente la lande libre et sans entrave. Si Xue Xiuzhuo souhaite faire évoluer sa carrière jusqu’au Grand Secrétariat, il a besoin de quelqu’un pour l’idolâtrer.

Le doigt de Shen Zechuan dessina un petit cercle sur la table.

- Vous avez fait bonne impression devant les étudiants de l’Université Impériale, la dernière fois ; ils peuvent servir de point de levier pour faire une faveur à Xue Xiuzhuo. Ces temps-ci, le Secrétaire Aîné Hai songe à étendre l’Université Impériale. Lorsque cela sera fait, Xue Xiuzhuo pourra tout naturellement choisir sa propre cohorte parmi ces rangs d’érudits prometteurs.

- S’attirer les faveurs en passant par le plus grand nombre.

Xi Hongxuan fit tourner cette idée dans son esprit.

- Mais Yanqing a déjà ses propres hommes. Pourquoi doit-il aller les dénicher au sein de l’Université Impériale ?

- Pour s’opposer à Xiao Er de manière efficace, les huit clans doivent faire la paix et unir leurs forces contre l’ennemi – mais le Clan Yao est récalcitrant. Réfléchissez-y. Dans le cœur des lettrés, le Clan Yao est aussi noble et immuable qu’un éperon rocheux. Sans parler du fait qu’ils soient réticents à l’idée de travailler avec vous ; la véritable menace est qu’ils retournent leur veste et s’allient à Xiao Er. Le cas échéant, pourquoi ne pas évincer le Clan Yao maintenant et laisser la place à quelqu’un qui sera à la hauteur de la tâche ?

Il ne s’était pas attendu à ce que Xi Hongxuan s’esclaffe.

- Vous êtes né à Zhongbo, aussi ne comprenez-vous pas l’histoire des Huit Grands Clans, dit Xi Hongxuan. Même si le Clan Yao ne souhaite pas joindre ses forces au nôtres, nous ne pouvons pas l’évincer. Il est impossible de l’évincer.

- Rappelez-vous la cour impériale au moment où le Clan Yao était au sommet de sa gloire. Il n’y avait aucune place pour le Clan Xi, à l’époque.

Shen Zechuan sortit son mouchoir pour essuyer quelques gouttes d’eau sur la table.

- Je sais que les clans nobles ont un lourd passé. Je vous demande simplement de repousser le Clan Yao, pour le moment. La situation est délicate ; nous ne pouvons plus tolérer les actes imprévisibles d’une tierce partie. Er-gongzi, celui qui hésite aura perdu.

Xi Hongxuan n’osait pas prendre seul une telle décision.

- Nous en rediscuterons. Laissez-moi y réfléchir.

 

***

 

Xiao Chiye était en train d’aiguiser sa lame. Il essuyait soigneusement Croc de Loup, n’y laissant pas un seul grain de poussière.

Zhao Hui tendit une tasse de thé à Lu Guangbai.

- Er-gongzi essuie cette lame depuis des lustres. Prévoit-il de dépecer quelqu’un avec ?

Lu Guangbai rit dans sa tasse de thé.

- A partir d’aujourd’hui, même le simple fait de sortir d’ici avec cette lame sera ardu. Jiming, l’avez-vous bien observé ? Tout à l’heure, lorsqu’ils lui ont pris son insigne, j’ai cru que ce morveux allait pleurer.

- C’était un rare spectacle, sourit Xiao Jiming. Et dire qu’un jour viendrait où ce petit scélérat serait incapable d’évacuer sa colère.

- Qui êtes-vous en train de calomnier ? demanda Xiao Chiye en repliant son mouchoir d’un air irrité.

- Nous vous complimentons, soupira Lu Guangbai. Toutes ces années passées à Qudu n’auront pas servi à rien. Quel jeu d’acteur – j’y ai presque cru.

- Que pouvons-nous apprendre d’autre, ici ?

Xiao Chiye rengaina sa lame, puis s’assit et croisa les jambes.

- Le Vieux Wei s’est décarcassé ; je devrais lui attribuer plus de mérite. C’est une chose, dit-il en gratifiant les deux hommes d’un regard oblique, mais pourquoi mes gege sont-ils aussi ravis de me voir mis au pied du mur et roué de coups ?

- Ce n’est pas tous les jours que l’on voit une chose pareille, s’émerveilla Zhao Hui.

- Je craignais que vous ne soyez bouleversé, dit Lu Guangbai. Vous pouvez être ami avec tout le monde, sauf le Fils du Ciel.

- Sa Majesté est monté sur le trône brusquement et a vu sa vie être menacée à plusieurs reprises. Il n’a jamais été un homme courageux ; il n’est pas étonnant qu’il ait peur, aujourd’hui, dit Xiao Chiye. C’est simplement que je n’avais pas anticipé que Fu Linye se joindrait à eux.

- Fu Linye a des relations avec le Clan Xi, mais il n’est pas du genre à servir de laquais aux clans nobles, dit Xiao Jiming. Il espérait probablement gagner les faveurs de Sa Majesté et Wei Huaixing en t’attaquant.

- Et vous avez dû pousser Wei Huaixing dans ses retranchements, pour l’inciter à jouer sa carte maîtresse, dit Lu Guangbai. Maintenant qu’il l’a montrée, nous pouvons répliquer.

- Wei Huaixing a servi pendant très longtemps et, pourtant, il n’a jamais été promu au sein du Grand Secrétariat. Cela a tout à voir avec son tempérament.

Xiao Chiye réfléchit un instant.

- Bien que Hua Siqian se soit servi de lui lorsqu’il était en vie, il le faisait avec un grand mépris. Maintenant que le Secrétaire Aîné Hai craint que les clans nobles ne prennent le contrôle du Grand Secrétariat, il fait obstacle à leurs possibilités de promotion. Wei Huaixing est plein de rancœur. S’il souhaite défier le Secrétaire Aîné Hai, il va devoir s’allier à Xi Hongxuan et être l’avant-garde qui chargera sur les lignes ennemies. Tout cela dans le simple but de pouvoir franchir un seuil qui est resté hors de sa portée pendant plus de dix ans. Je n’ai eu qu’à tressaillir, et il n’a pas pu s’empêcher de mordre à l’hameçon et présenter cet ultime rapport.

- Tout repose là-dessus – même si les instructions ont été falsifiées, il s’agit d’une excellente falsification, l’avertit Xiao Jiming. Il a commencé par remettre en question les comptes de l’Armée Impériale, sachant pertinemment que Hai Liangyi angoisse à propos du déboursement des fonds militaires depuis que le Clan Hua les a détournés. Il ne peut pas tolérer le moindre centime non répertorié. Ces prochains jours, le Bureau de Surveillance va enquêter sur toi. Nous ne pouvons pas laisser Fu Linye agir seul sur cette affaire. Nous devons nous assurer que quelqu’un mènera l’enquête avec lui – une personne juste et impartiale du Bureau de Surveillance ou les fonctionnaires autorisés à effectuer des audits.

- Fu Linye travaillera probablement avec un membre de la Police Militaire.

Zhao Hui s’interrompit.

- C’est une affaire d’assassinat, après tout.

- La Police Militaire, dit Lu Guangbai en regardant Xiao Chiye. Nous n’avons pas un seul allié dans ses rangs ; au contraire, elle est pleine d’adversaires. A-Ye, vous allez vous faire passer à tabac, cette fois-ci.

Xiao Chiye afficha un sourire mauvais.

- La Police Militaire, hein. Il se trouve que je connais quelqu’un.

 

***

 

Quelques jours plus tard, le Bureau de Surveillance commença son enquête sur les comptes de l’Armée Impériale. Avant de partir, Fu Linye croisa Shen Zechuan, qui avait été désigné pour l’aider avec l’inspection. Sachant que cet homme était un nouveau favori du trône, Fu Linye n’osa pas l’offenser ; il ordonna à quelqu’un de servir un thé de qualité à leur invité. Shen Zechuan en avala quelques gorgées et dit d’un ton cordial :

- C’est la première fois que j’effectue une telle tâche, aussi devrai-je demander les conseils de Son Excellence.

Fu Linye considérait Shen Zechuan comme une personne qui, comme lui, était du côté des clans nobles, mais il continuait de le craindre. Ainsi, il répondit simplement :

- Je crains ne pas être digne de vous conseiller. Je vais devoir importuner Monsieur le Juge et lui demander de partager la mission avec moi. L’Armée Impériale est aussi impénétrable qu’un seau en métal. Je crains qu’elle ne conserve deux livres de compte différents, aussi compterai-je sur Monsieur le Juge pour effectuer une fouille approfondie.

Quant à qui ou quoi fouiller, Fu Linye n’en dit pas un mot. Il était réticent à s’associer aux clans nobles et à froisser Hai Liangyi, mais il n’avait aucunement envie d’aider Hai Liangyi à marcher sur les plates-bandes des clans nobles. Cet homme était un indécis de première qui allait où que le vent souffle. Cette fois, il avait gravement offensé Xiao Chiye, et les hommes du commandant suprême lui rendraient sans aucun doute la tâche difficile lorsqu’il irait vérifier les livres de compte. Xiao Er était un trou du cul notoire ; fouiller sa résidence revenait à chercher les ennuis. Concernant cette affaire, Fu Linye ne voulait pas se mouiller. Il prévoyait de pousser Shen Zechuan sur le devant de la scène et le laisser procéder à la fouille – il pourrait être le pion qui essuierait la colère de Xiao Chiye. A sa grande surprise, Shen Zechuan accepta volontiers ce rôle. La méfiance qu’il éprouvait envers lui diminua ; désormais, lorsqu’il regardait Shen Zechuan, il voyait un novice.

Les deux hommes se séparèrent, et chacun partit de son côté : Fu Linye se rendit au bureau de l’Armée Impériale, tandis que Shen Zechuan se dirigeait vers la résidence du Prince de Libei en compagnie d’un censeur du Bureau de Surveillance et d’un contingent d’hommes de la Police Militaire. Ils étaient encore loin lorsque Ding Tao, étendu sur le toit, aperçut Shen Zechuan et soupira :

- Comment a-t-il pu faire ça ?

- Comment a-t-il pu faire quoi ? demanda Gu Jin.

Ding Tao tourna autour du pot.

- Tu veux parler du fait qu’il fasse ami-ami avec Er-gongzi mais aide tout de même les autres à mener l’enquête ? demanda Gu Jin.

- Ils sont plus qu’amis-amis !

- Ainsi sont les hommes, dit Gu Jin en ouvrant sa flasque de vin. Tu comprendras quand tu seras plus grand. Tout le monde est comme ça. Une étreinte derrière une porte close est une affaire privée ; ce qu’il se passe une fois que tu as enfilé des vêtements et franchi la porte est une affaire publique. Tu ne peux pas comparer… Pas besoin d’écrire ça !

Aux portes du manoir, la troupe de Shen Zechuan fut accueillie par Zhao Hui et Chen Yang. Puisque Zhao Hui détenait un poste militaire officiel, ce fut à Shen Zechuan de s’incliner.

- La cour de l’héritier se trouve dans l’aile nord de la résidence, lui dit Zhao Hui. Elle contient essentiellement des registres des affaires militaires de Libei.

- Aujourd’hui, l’objectif de la visite de cet humble serviteur est d’enquêter sur le second jeune maître, répondit Shen Zechuan avec tact. Cela n’a rien à voir avec Libei.

Satisfait de voir que Shen Zechuan n’était pas venu semer le trouble, Zhao Hui acquiesça et lança un coup d’œil à Chen Yang, qui avança d’un pas pour ouvrir la voie.

- La cour du second jeune maître se trouve dans l’aile est, expliqua-t-il en marchant. Monsieur le Juge et mes frères de la Police Militaire, veuillez me suivre.

Shen Zechuan s’inclina à nouveau face à Zhao Hui et suivit Chen Yang.

La cour de Xiao Chiye était spacieuse. Techniquement parlant, sa taille surpassait celle de l’héritier, mais Xiao Fangxu avait été trop fainéant pour effectuer le changement, et les frères ne prêtaient eux-mêmes aucune attention à ce genre de chose. Xiao Chiye avait vécu ici pendant tout ce temps même si, depuis qu’il avait accepté le poste de commandant suprême de l’Armée Impériale, il passait rarement ses nuits là. La plupart du temps, il dormait dans une maison plus petite près du bureau de l’Armée Impériale.

Lorsque Shen Zechuan l’aperçut, il pêchait près d’un étang bordé d’arbres, drapé d’une cape de paille tressée.

- Son Excellence arrive de bonne heure, remarqua Xiao Chiye. Avez-vous pris un petit-déjeuner ?

- J’ai mangé au Bureau de Surveillance, dit Shen Zechuan. Je vois que le commandant suprême a un goût prononcé pour la paresse.

- Je ne suis qu’un homme désœuvré après qu’on l’a suspendu. Comment pourrais-je être comparé à Son Excellence ? demanda Xiao Chiye en agitant sa canne à pêche, comme pour prouver son oisiveté. Bien que vous soyez ici pour fouiller ma cour, vous devez d’abord me montrer le mandat.

- Nous sommes tous des habitués, répondit placidement Shen Zechuan. Le commandant suprême ne fait-il pas preuve d’idiotie en me faisant obstinément obstacle pour gagner quelques minutes ?

- Je n’accepte que les mandats officiels.

Xiao Chiye se leva et se débarrassa de sa cape et de sa canne.

- Si vous voulez entrer dans ma cour, montrez-moi le mandat.

Le censeur du Bureau de Surveillance qui les accompagnait avança immédiatement d’un pas pour intervenir :

- Messieurs, calmez-vous, restons courtois. Commandant Suprême, veuillez patienter un instant. Monsieur le Juge, ne vous mettez pas en colère.

- La Police Militaire sait mieux que quiconque l’importance de faire les choses dans les règles, dit Xiao Chiye en approchant, la voix glaciale. N’avez-vous donc pas appris cela après avoir quitté le Temple de la Culpabilité ?

Shen Zechuan lui rendit son regard, imperturbable.

- Un tigre perdu dans la plaine peut se faire insulter par des chiens sauvages. Qu’un chien tel que moi vous montre le mandat de perquisition ou non, vous serez obligé de m’accueillir avec le sourire.

Essuyant la sueur sur son front, le censeur se fraya un chemin entre eux et joignit poliment les mains en les implorant :

- Nous pouvons en discuter. Ce n’est qu’un…

- Voilà une langue bien pendue.

Xiao Chiye repoussa le censeur sans même lui accorder un regard et avança d’un pas.

- Je me demande si vous oseriez répéter ça avec vos poings.

- Pas de poings ! Vous ne devez pas vous battre ! hurla le censeur en s’interposant. Nous avons un mandat de perquisition – veuillez y jeter un œil, Commandant Suprême – et nous devons fouiller la résidence – Monsieur le Juge, attendez, s’il vous plaît… laissez-moi arranger les choses… Ohé ! Pas b’soin d’brailler comme ça – pourquoi faut-y donc qu’vous vous r’biffiez ?!

Dans un moment d’anxiété, il s’était remis à parler dans son dialecte local.

 

 

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